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LA PLUME NOMADE

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Géraldine et les kiwis

  • Photo du rédacteur: La plume nomade
    La plume nomade
  • 7 mai
  • 9 min de lecture

Les présentations


“Kia Ora!”, ou plutôt devrais-je dire “Salut!” Pour les non initiés au langage Maori. Moi c'est Géraldine, un fourgon blanc aménagé Toyota Hiace de 2007, plus toute jeune mais encore élégante. Mon métier? Je fais vivre l'expérience de la vanlife aux aventuriers désireux de découvrir les terres néo-zélandaises. Résidant à Christchurch sur l'île du Sud, je dois vous dire que cette ville calme possède une atmosphère particulière. Modernité et vestiges du passé douloureux des tremblements de terre de 2011 se mélangent parmi les immeubles du centre. Les anciens tramway circulant lentement sur Regent Street entre les commerces colorés se heurtent aux bruits démesurés des feux de traversée pour piétons rappelant les plus célèbres batailles de sabre laser de Star Wars. Pour les âmes paisibles, le jardin botanique offre un délicieux avant-goût de la végétation luxuriante poussant à travers le pays.


En ce début de février 2025 alors que la saison estivale bat son plein, ma propriétaire Mary une femme admirable je vous l'accorde, vient de m'annoncer que je pars en ballade pour quinze jours avec un couple franco-canadien. En provenance de Montréal après trois vols et plus de vingt heures d'avion cumulées, une journée complète perdue par la magie des fuseaux horaires et dix-huit heures de décalage horaire avec leur cher Québec, je peux vous dire que je vais les ramasser à la petite cuillère ces deux-là! Notre rencontre est digne d'un roman, un vrai coup de foudre! Bastien et Annie sont tellement enthousiastes dès le premier regard que je ne peux que les trouver adorables. Deux enfants dans un corps d'adulte, je pense qu'on va bien s'amuser!


Départ tonitruant


Pour les impressionner, je décide de les emmener directement dans le sud de la région de Canterbury. Le temps est couvert et un peu frais, les milliers de moutons et vaches broutant dans les pâturages forment un immense jeu de Go sur un tapis verdoyant. Jusqu'à ce fameux virage, où le soleil éclatant fait apparaître un nouveau monde. Place aux herbes dorées des montagnes arides abritant quelques lupins mauves bordant les eaux cristallines des lacs Tekapo et Pukaki dont la surface se confond avec l'intensité du ciel bleu dénué de cumulus. J'observe discrètement leur réaction avec amusement. Tout d'abord ébahis et cloués sur mes sièges, puis criant à gorge déployée, leurs rétines semblent se fracturer devant tant de beauté! Je décide d'en remettre une couche en empruntant la route panoramique longeant l'immense miroir d'eau turquoise avec en toile de fond un invité de marque, le mont Cook culminant à 3724 mètres et visible à 70 kilomètres à la ronde, entouré de ses glaciers et cimes enneigées. Fière de moi en ayant eu les réactions escomptées, la suite du voyage s'annonce palpitante!


La routine dans un cadre atypique


Je suis loin d'être un de ses camping car mastodontes que l'on peut voir en Amérique du Nord. De taille bien plus modeste, je suis fort bien optimisée mais gare à l'intimité! Mes toilettes sont collées à l'évier de la cuisinette et font face au lit dépliant qui fait également office de salon. Panneaux solaires et réserves d'eau, je suis majeure et autonome ce qui me permet de m'arrêter dans les endroits les plus sauvages du pays. Mes deux passagers s'acclimatent très rapidement à ce nouveau mode de vie et développent une routine dans leur nouveau domicile. 


Niveau organisationnel, je laisse Annie me conduire ce qui me fait bien rire lors des premiers kilomètres où elle doit s'habituer à rouler à gauche. Mais elle s’habitue vite et je prends un réel plaisir à l'écouter chanter à tue-tête sur sa sélection musicale. Bastien est quant à lui en charge de ma vidange, quel bonheur de me soulager de mes eaux usées! Pour la gestion de la nourriture, ils reviennent un midi du supermarché New World avec une carte de membre. Depuis ce jour, cette enseigne est devenue un lieu sacré pour faire le plein de crudités, houmous et pâtes. Côté hygiène, je m'assure de les envoyer se doucher dans les piscines publiques. Et pour le transit intestinal, direction les toilettes sèches des campements, hors de question que ça empeste dans mon habitacle! Et tant pis si les odeurs nauséabondes qui en émanent leur imprègnent les narines l'heure suivante. 


Bien installée dans un campement sauvage mais réglementé, je passe mes matinées et soirées à avec mes deux aventuriers. Leur journée ne peut débuter sans leur café instantané, un petit plaisir malgré son goût qui laisse à désirer. Après une étape bien chargée, la baignade dans les eaux fraîches et limpides des lacs est vivifiante pour le corps mais douloureuse pour les pieds agressés par les galets, occasionnant des cris aigus à chaque pas. Je m'amuse en observant leurs parties de jeux de société en bord de rivière qui sont interrompues par les attaques de phlébotomes et les bourrasques de 17 heures faisant voler leurs cartes. Mon moment préféré est au coucher du soleil, lorsque allongés sur le lit les couleurs rose-orangées les interrompent dans leur lecture pour admirer la lente descente de l'étoile dans l'océan Pacifique. 


Je crois que s'ils arrivent aussi bien à s'entendre c'est grâce à leur grande complicité (il en faut pour vivre 24h sur 24 ensemble, même en couple depuis longtemps!), mais aussi en raison des quelques moments en solitaire qu'ils s'octroient. Lorsque Bastien a trop de fourmis dans les jambes, il part grimper les pentes abruptes menant à des sommets vertigineux pendant qu’Annie libère son imagination depuis la vallée à travers des écrits de fiction. Après ça ils sont encore plus heureux de se retrouver! Je leur laisse une soirée en amoureux dans l'original cinéma de Wanaka. Affalés dans un canapé avec un cookie chaud servi pendant l'entracte, ils visionnent le dernier Bridget Jones sans sous-titres pendant que leurs voisins dégustent une pizza-bière dans une voiture!


Un chemin de merveilles 


Chaque mètre parcouru sur mon île du Sud pourrait remporter le prix de photographie du National Geographic. Je suis peut-être un peu chauvine mais la réalité n'en n'est pas loin. De l'aridité des montagnes de l’Otago aux paysages dramatiques norvégiens du Fjordland national park en passant par les forêts luxuriantes de la côte ouest et les décors lunaires de l’Arthur’s pass, la Nouvelle-Zélande regorge de trésors naturels. Je ne me fatiguerai jamais de rouler à travers les vignobles, champs de lavande et peupliers alignés de Wanaka, ce village balnéaire reposant paisiblement face à son lac panoramique dans lequel pousse son arbre rendu populaire sur les réseaux sociaux. Je m’émerveille à chaque passage sur la route escarpée de Milford Sound où se dressent d'imposantes falaises, se terminant en cul-de-sac sur un point de vue saisissant sur le fjord dont les formations rocheuses semblent sortir de l'eau. Je me sens dans la carcasse d'un hippie Westfalia lorsque je longe les plages de sable blanc de la West coast appréciées par les surfeurs. J'aime traverser les Alpes du sud, cette chaîne de montagnes aux sommets enneigés me rappelant leurs cousines européennes. Je me crois en plein rêve lorsque je surplombe l'immensité des lacs du district de McKenzie et de Queenstown, me donnant l'impression de flotter sur ces étendues d'eau glaciaire. J'adore l'adrénaline que me procure les routes sinueuses du Haast pass et ses cascades cachées dans une jungle aux airs jurassiques, même si les longues descentes me font mal aux freins. Je suis toujours émotive à la vue des glaciers Fox et Franz-Joseph, un petit pincement au moteur quand je constate qu'ils reculent année après année.  


Les québécois me font parcourir près de 2 500 kilomètres. À mon âge cela ne va pas arranger mes problèmes de transmission! Je profite des pauses accordées pour me reposer lorsqu'ils partent randonner. À leur retour, j'écoute avec attention leur débriefing passionné. Ils parlent des ponts suspendus de la Hooker valley track qui les mènent au pied des glaciers du mont Cook. Ils ressortent ravis de la forêt de Cascade Creek et ses immenses arbres de 30 mètres couverts de mousse aux formes parfois humaines, sanctuaire de nombreux oiseaux dont le piwakawaka et sa queue en éventail. Bastien raconte son ascension alpine sur la Gertrude saddle durant laquelle il se perd à plusieurs reprises avant d'atteindre le panorama magistral sur l'entrée du fjord. Et il enchaîne avec le sommet du Roy's peak, une exigeante montée donnant accès à un décor de carte postale de l'Otago sur lequel hautes montagnes et lacs s'entremêlent. Annie est fière d'avoir pu suivre Marine (une ancienne voisine de Bastien en voyage également) et Morgane du Diamond Lake jusqu'au Rocky peak, suivi d'une bonne bière tous ensemble au Lake bar de Wanaka! Les deux sont intrigués par la couleur de l'eau des gorges d’Hokitika et la forme atypique des Pancake rocks, ces formations rocheuses en couches qui ressemblent à des piles de crêpes. 


Tout au long du périple, ils sont à l'affût de l'éventuelle sortie d'un kiwi, l'oiseau emblématique néo-zélandais. Ne se montrant que la nuit, je vois leurs espoirs s'amenuiser. Le résultat est le même avec le kéa, perroquet des forêts local. Par contre Annie n'est pas en manque d'abeilles et bourdons qui essaient de la butiner attirés par son gilet jaune! Je comprends leur malaise lorsqu'ils voient défiler le long des routes les dépouilles d’opossums écrasés par les locaux, considérés comme nuisibles à la faune et la flore. Je constate qu'Annie est une grande amoureuse des animaux, toutefois ses tentatives d'approcher un mouton, une vache, un cerf ou un lièvre restent vaines malgré sa motivation! 


Ces deux semaines sont passées à une vitesse folle, dans le respect des limites bien sûr. C'est l'heure de nous dire au revoir et de se quitter en marche arrière. Au revoir mes amis, j'espère vous recroiser un jour.


Nouvelles de l'île du Nord


Entreposée dans mon garage de la banlieue de Christchurch dans l'attente d'un nouveau départ, qu'elle n'est pas ma surprise de recevoir une carte postale d'Annie et Bastien envoyée de l'île du Nord. Ils ont loué une Suzuki Swift (ils m'ont déjà oublié…) mais mentionnent qu'elle ne m'arrive pas au pare-brise (ouf!). 


Rendus sur la péninsule de Coromandel, ils prennent un rythme de vacanciers. Ils profitent de la piscine du camping, se font des steaks sur le grill et profitent des belles plages dont celle de Cathedral Cove, où se dresse une arche de pierre naturelle donnant sur les eaux bleues de l'océan. Fait cocasse en se rendant sur Hot water beach, Bastien pense que les sources d'eau chaudes qui apparaissent en creusant avec une pelle dans le sable sont un attrape-touriste. En voyant les plagistes barboter dans leur trou d'eau, il décide de tester sans prendre garde…et se brûle le pied! Quel champion celui-là! J'apprends qu'ils visitent Hobbiton, le célèbre village des Hobbits qui a servi pour le tournage du Seigneur des anneaux. La quarantaine de minuscules portes rondes colorées des maisons de ces petits hommes sortis du roman de Tolkien, éparpillées dans les collines verdoyantes de la Comté, les replongent dans les scènes cultes des films. Attention tout de même au plafond à l'intérieur des habitations, il est plutôt bas! Ils me parlent également de leur étrange arrêt à Rotorua, la cité géothermique et sa forêt de séquoias géants, où les parcs publics du centre-ville regorgent de bassins thermaux naturels à près de cent degrés desquels émanent des odeurs nauséabondes de soufre. Les voilà obligés de se pincer le nez pour observer un curieux spectacle, celui des bulles de gaz propulsant des jets de boue dans l'air, pendant qu’à quelques mètres se jouent des parties de croquet en tenue blanche immaculée sous le regard des totems rouges de figures Maoris menaçantes. C'est loufoque leur histoire, n'auraient-ils pas un peu trop forcé sur la Pilsner ces deux-là? 


Je reçois une seconde carte une semaine plus tard. Les voici dans le parc national de Tongariro, qui abrite les terres du Mordor pour les amateurs de la trilogie fantastique. Leur présence semble déchaîner la colère de l'œil de Sauron pendant deux jours. Rafales de vent à 80 km/h, pluie tombant sans interruption, concentration de nuages menaçants et basses températures forment un microclimat inhospitalier peu propice à quelconque activité extérieure. Enfermés dans leur hôtel rustique aux allures du film Shining, ce n'est qu’au troisième jour que Bastien se lance dans la Tongariro alpine crossing, une célèbre randonnée qui traverse les cratères de la quête de Frodon Sacquet. Les paysages volcaniques arides constitués de pierres sombres et recouverts d'une couche de neige fraîchement tombée offrent un panorama saisissant. Malgré ses doigts gelés par le froid, Bastien s'obstine à prendre des clichés du maître des lieux, le volcan Ngauruhoe en activité culminant à 2 287 mètres. Le passage vertigineux aux abords du cratère rouge requiert de marcher accroupi et penché pour lutter contre les violentes bourrasques, alors que la descente vers des lacs Emerald étagés aux couleurs vert émeraude est ponctuée de glissades dans le sable noir instable. 


Leur dernière étape les amène à Tuakau dans la banlieue d’Auckland pour des heureuses retrouvailles avec Thomas, un ami d'enfance de Bastien et pur produit de Carquefou en France, qui vit désormais en Nouvelle-Zélande avec sa famille. Ils s’immergent dans le mode de vie des kiwis, le surnom donné aux habitants du pays. C'est l'occasion de stimuler leurs papilles gustatives en enchaînant des mets indiens, philippins, turques sans oublier les spécialités locales le fish and chips, la boisson gazeuse L&P et la tartinade Marmite à base d'extraits de levures qui goûte la ferraille. Je me dis que ça doit leur changer du régime de salades sur l'île du Sud! Ils en profitent pour visiter la ville d’Auckland construite parmi les volcans, et me parlent de leur étrange ressenti de se retrouver dans une métropole et ses grands immeubles après un mois passé en nature. Le cadre n'en reste pas moins agréable en bordure de l'océan avec les bateaux amarrés dans la marina du port. Et bien qu'habitués au côté multiethnique de Montréal, mes amis québécois sont autant surpris par les nombreuses origines des aucklandais que par leur style vestimentaire complètement décousu! 


Leur périple sur les terres kiwis s'achève, l'heure pour eux de s'envoler vers une autre destination. La dernière phrase, tout en bas à droite, me fait rougir des phares arrières. “Nos esprits sont encore sur les routes de l'île du Sud, qui nous aura fait vivre des moments magiques. Merci pour tout Géraldine. À bientôt, Annie et Bastien”. 



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